Wallon : Différence entre versions
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− | + | '''''Le wallon''''' (autonyme : walon /wa.ˈlɔ̃/) est une langue d'oïl parlée en Belgique, en France, et très résiduellement dans la partie nord-est de l'État américain du Wisconsin[2]. Elle est reconnue comme langue régionale endogène par la Communauté française de Belgique, au sein de laquelle elle est la plus importante des langues romanes endogènes en superficie (70 à 75 % de la région wallonne) et en effectifs (1 000 000 à 1 300 000 locuteurs en 1998, 360 000 en 2018) | |
Le wallon fait partie d'un groupe de langues qui comprend le picard, le franc-comtois et le lorrain. Ces langues ont en effet un certain nombre de caractéristiques en commun, dont une influence germanique. Le wallon était la langue la plus parlée en Belgique romane jusqu'à la Première Guerre mondiale. Depuis, son usage dans la vie quotidienne s'est largement réduit au profit du français, qui est devenu la principale langue de la Wallonie. | Le wallon fait partie d'un groupe de langues qui comprend le picard, le franc-comtois et le lorrain. Ces langues ont en effet un certain nombre de caractéristiques en commun, dont une influence germanique. Le wallon était la langue la plus parlée en Belgique romane jusqu'à la Première Guerre mondiale. Depuis, son usage dans la vie quotidienne s'est largement réduit au profit du français, qui est devenu la principale langue de la Wallonie. | ||
Langue de la partie romane de l'ancien diocèse de Liège, le wallon se compose de quatre grandes variétés dialectales et d'une forme normalisée. Ses locuteurs peuvent être appelés des Wallons[5], mais ce terme se référant avant tout aux habitants de la Wallonie, on lui préfère de plus en plus celui de wallonophone[6] (walon-cåzant ou walon-djåzant en wallon). | Langue de la partie romane de l'ancien diocèse de Liège, le wallon se compose de quatre grandes variétés dialectales et d'une forme normalisée. Ses locuteurs peuvent être appelés des Wallons[5], mais ce terme se référant avant tout aux habitants de la Wallonie, on lui préfère de plus en plus celui de wallonophone[6] (walon-cåzant ou walon-djåzant en wallon). | ||
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+ | Wallonie-linguistique.png|Carte régionale | ||
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− | + | ==Origine du nom== | |
Le nom Wallon est issu du moyen néerlandais Wale (aujourd'hui Waal), continuateur de walh utilisé par les Germains pour désigner les populations celtophones ou romanes, suivi du suffixe -on. Sa plus ancienne trace écrite, d'après les travaux d'Albert Henry, philologue romaniste belge, date de la seconde moitié du XVe siècle dans les Mémoires de Jean, sire de Haynin et de Louvignies[7],[8],[9] où il désigne les populations romanes des Pays-Bas bourguignons. La portée sémantique se réduira encore un peu plus lors de la République et de l'Empire français, le royaume uni des Pays-Bas et l'indépendance belge pour ne plus désigner que les Belges de langue romane. Les recherches en dialectologie durant le XIXe siècle vont peu à peu faire la distinction entre les différents dialectes belgo-romans, et restreignent alors dans le domaine linguistique le mot wallon à la langue wallonne stricto sensu. | Le nom Wallon est issu du moyen néerlandais Wale (aujourd'hui Waal), continuateur de walh utilisé par les Germains pour désigner les populations celtophones ou romanes, suivi du suffixe -on. Sa plus ancienne trace écrite, d'après les travaux d'Albert Henry, philologue romaniste belge, date de la seconde moitié du XVe siècle dans les Mémoires de Jean, sire de Haynin et de Louvignies[7],[8],[9] où il désigne les populations romanes des Pays-Bas bourguignons. La portée sémantique se réduira encore un peu plus lors de la République et de l'Empire français, le royaume uni des Pays-Bas et l'indépendance belge pour ne plus désigner que les Belges de langue romane. Les recherches en dialectologie durant le XIXe siècle vont peu à peu faire la distinction entre les différents dialectes belgo-romans, et restreignent alors dans le domaine linguistique le mot wallon à la langue wallonne stricto sensu. | ||
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+ | ==Histoire== | ||
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+ | Cette carte représente l'ancien Diocèse de Liège (en jaune) qui a évolué à partir de la Civitas Tungrorum et qui avait probablement les mêmes frontières. La ligne rouge représente la frontière linguistique entre le Néerlandais et le Français. L'orange représente les frontières nationales modernes. La partie romane du Diocèse de Liège coïncide avec les limites de la région de langue wallonne. | ||
+ | Le contexte historique de la formation du wallon est lié à l'extension territoriale du diocèse de Liège. L'ancien diocèse de Liège, en sa partie wallonne (dans le sens de roman), a des limites qui coïncident de manière frappante avec celle du wallon (les archidiocèses de Trèves et de Reims ont laissé leur marque en Belgique avec respectivement le gaumais et champenois, et les diocèses de Cambrai et Tournai avec le picard). L’Atlas linguistique de la Wallonie a bien mis en valeur cette très ancienne trace possible de l’influence des subdivisions de l’Église. | ||
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+ | Au seizième siècle, le poète français Pierre de Ronsard décrit dans la seconde préface de son œuvre La Franciade le wallon comme une forme de français archaïque: "Je t’adverti de ne faire conscience de remettre en usage les antiques vocables, et principalement ceux du langage wallon et picard, lequel nous reste par tant de siècles l’exemple naïf de la langue française [...]." | ||
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+ | Se renseigner sur l'évolution du wallon avant 1600 pose un véritable problème : c'est Le problème de l'ancien wallon, comme l'a appelé Louis Remacle. Non seulement, les rares textes latins « fournissent de-ci de-là un terme roman attestant un changement phonétique, mais les nombreux documents écrits en « langue vulgaire » sont, selon Haust, « écrits en français, et n'est wallon que dans certaines prescriptions et par intermittence». En se basant sur les attestations disponibles, Louis Remacle a montré que, « en 800 déjà, une dizaine de divergences traçaient dans le nord de la Gaule les grandes lignes d'une segmentation dialectale ». Le wallon « était nettement et définitivement individualisé dès 1200 ou dès le début du XIIIe siècle ». Au sujet de la datation, il ajoute : « Les faits classés sous la rubrique "Avant 1300" par exemple, sont attestés entre 1250 et 1300, mais il se peut très bien qu'il se soient produits plus tôt. »[11]. Autrement dit, les dates proposées par Remacle pour les diverses évolutions phonétiques, sont des « dates butoirs » qui, en l'absence d'autres attestations, laissent toute possibilité à une date antérieure, a priori imprécise. | ||
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+ | Les environs de l'an 1600 apportent comme une confirmation écrite des évolutions des représentations au cours des siècles antérieurs : c'est à cette époque que s'impose définitivement le système graphique français en pays wallon[12]. C'est au début du XVIIe siècle qu'on prend conscience de l'écart entre la langue parlée (le wallon) et la langue écrite (le français), ce qui permet l'émergence d'une littérature wallonne : ces textes relèvent de la para-littérature satirique et bouffonne. Le français était et est resté la seule langue pour les textes formels, officiels, etc. | ||
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+ | La langue wallonne reste jusqu'au début du XXe siècle la langue parlée par la majorité de la population de la moitié Est de la Belgique romane car le français y est seulement la langue des lettrés et des classes supérieures. Le bilinguisme wallon-français est alors une réalité, que ce soit dans le monde professionnel ou dans le monde politique. Dans la sidérurgie et à la mine, le wallon est souvent la langue utilisée pour la formation des ouvriers et dans de nombreuses communes, les conseils communaux se font souvent dans les deux langues. | ||
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+ | ==Identification de la langue== | ||
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+ | La distinction entre les différentes langues régionales de Belgique romane n'a été établie qu'à la fin du XIXe siècle par le philologue allemand Altenburg qui précise d'ailleurs que l'aire du wallon ne peut ni se restreindre au liégeois ni s'étendre au picard : | ||
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+ | « Le dialecte liégeois est senti comme nettement plus différent du picard que les dialectes des provinces de Namur et de Hainaut. Même si le dialecte actuel de la région française limitrophe [...] constitue en quelque sorte un chaînon intermédiaire ou une transition entre le wallon et picard et même si les variétés occidentales du wallon se rapprochent du rouchi, cependant le phonétisme, principalement le consonantisme, accuse de profondes différences entre le picard et le wallon. » | ||
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+ | De par cette identification tardive, les autres langues endogènes de la Belgique romane sont quelquefois désignées comme « wallonnes », y compris par leurs propres locuteurs, ce qui peut entraîner une certaine confusion. | ||
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+ | Certains linguistes plus contemporains classent cependant l'ensemble du wallon au sein d'un groupe appelé langues d'oïls septentrionales avec le picard, le normand septentrional et l'anglo-normand (langue éteinte), alors que le champenois, le lorrain et le bourguignon sont définis comme groupe des langues d'oïls orientales. | ||
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+ | ==Liens externes== | ||
+ | [https://fr.wikipedia.org/wiki/Wallon Wallon Histoire] |
Version actuelle en date du 28 mai 2025 à 10:49
Le wallon (autonyme : walon /wa.ˈlɔ̃/) est une langue d'oïl parlée en Belgique, en France, et très résiduellement dans la partie nord-est de l'État américain du Wisconsin[2]. Elle est reconnue comme langue régionale endogène par la Communauté française de Belgique, au sein de laquelle elle est la plus importante des langues romanes endogènes en superficie (70 à 75 % de la région wallonne) et en effectifs (1 000 000 à 1 300 000 locuteurs en 1998, 360 000 en 2018)
Le wallon fait partie d'un groupe de langues qui comprend le picard, le franc-comtois et le lorrain. Ces langues ont en effet un certain nombre de caractéristiques en commun, dont une influence germanique. Le wallon était la langue la plus parlée en Belgique romane jusqu'à la Première Guerre mondiale. Depuis, son usage dans la vie quotidienne s'est largement réduit au profit du français, qui est devenu la principale langue de la Wallonie.
Langue de la partie romane de l'ancien diocèse de Liège, le wallon se compose de quatre grandes variétés dialectales et d'une forme normalisée. Ses locuteurs peuvent être appelés des Wallons[5], mais ce terme se référant avant tout aux habitants de la Wallonie, on lui préfère de plus en plus celui de wallonophone[6] (walon-cåzant ou walon-djåzant en wallon).
Origine du nom
Le nom Wallon est issu du moyen néerlandais Wale (aujourd'hui Waal), continuateur de walh utilisé par les Germains pour désigner les populations celtophones ou romanes, suivi du suffixe -on. Sa plus ancienne trace écrite, d'après les travaux d'Albert Henry, philologue romaniste belge, date de la seconde moitié du XVe siècle dans les Mémoires de Jean, sire de Haynin et de Louvignies[7],[8],[9] où il désigne les populations romanes des Pays-Bas bourguignons. La portée sémantique se réduira encore un peu plus lors de la République et de l'Empire français, le royaume uni des Pays-Bas et l'indépendance belge pour ne plus désigner que les Belges de langue romane. Les recherches en dialectologie durant le XIXe siècle vont peu à peu faire la distinction entre les différents dialectes belgo-romans, et restreignent alors dans le domaine linguistique le mot wallon à la langue wallonne stricto sensu.
Histoire
Cette carte représente l'ancien Diocèse de Liège (en jaune) qui a évolué à partir de la Civitas Tungrorum et qui avait probablement les mêmes frontières. La ligne rouge représente la frontière linguistique entre le Néerlandais et le Français. L'orange représente les frontières nationales modernes. La partie romane du Diocèse de Liège coïncide avec les limites de la région de langue wallonne. Le contexte historique de la formation du wallon est lié à l'extension territoriale du diocèse de Liège. L'ancien diocèse de Liège, en sa partie wallonne (dans le sens de roman), a des limites qui coïncident de manière frappante avec celle du wallon (les archidiocèses de Trèves et de Reims ont laissé leur marque en Belgique avec respectivement le gaumais et champenois, et les diocèses de Cambrai et Tournai avec le picard). L’Atlas linguistique de la Wallonie a bien mis en valeur cette très ancienne trace possible de l’influence des subdivisions de l’Église.
Au seizième siècle, le poète français Pierre de Ronsard décrit dans la seconde préface de son œuvre La Franciade le wallon comme une forme de français archaïque: "Je t’adverti de ne faire conscience de remettre en usage les antiques vocables, et principalement ceux du langage wallon et picard, lequel nous reste par tant de siècles l’exemple naïf de la langue française [...]."
Se renseigner sur l'évolution du wallon avant 1600 pose un véritable problème : c'est Le problème de l'ancien wallon, comme l'a appelé Louis Remacle. Non seulement, les rares textes latins « fournissent de-ci de-là un terme roman attestant un changement phonétique, mais les nombreux documents écrits en « langue vulgaire » sont, selon Haust, « écrits en français, et n'est wallon que dans certaines prescriptions et par intermittence». En se basant sur les attestations disponibles, Louis Remacle a montré que, « en 800 déjà, une dizaine de divergences traçaient dans le nord de la Gaule les grandes lignes d'une segmentation dialectale ». Le wallon « était nettement et définitivement individualisé dès 1200 ou dès le début du XIIIe siècle ». Au sujet de la datation, il ajoute : « Les faits classés sous la rubrique "Avant 1300" par exemple, sont attestés entre 1250 et 1300, mais il se peut très bien qu'il se soient produits plus tôt. »[11]. Autrement dit, les dates proposées par Remacle pour les diverses évolutions phonétiques, sont des « dates butoirs » qui, en l'absence d'autres attestations, laissent toute possibilité à une date antérieure, a priori imprécise.
Les environs de l'an 1600 apportent comme une confirmation écrite des évolutions des représentations au cours des siècles antérieurs : c'est à cette époque que s'impose définitivement le système graphique français en pays wallon[12]. C'est au début du XVIIe siècle qu'on prend conscience de l'écart entre la langue parlée (le wallon) et la langue écrite (le français), ce qui permet l'émergence d'une littérature wallonne : ces textes relèvent de la para-littérature satirique et bouffonne. Le français était et est resté la seule langue pour les textes formels, officiels, etc.
La langue wallonne reste jusqu'au début du XXe siècle la langue parlée par la majorité de la population de la moitié Est de la Belgique romane car le français y est seulement la langue des lettrés et des classes supérieures. Le bilinguisme wallon-français est alors une réalité, que ce soit dans le monde professionnel ou dans le monde politique. Dans la sidérurgie et à la mine, le wallon est souvent la langue utilisée pour la formation des ouvriers et dans de nombreuses communes, les conseils communaux se font souvent dans les deux langues.
Identification de la langue
La distinction entre les différentes langues régionales de Belgique romane n'a été établie qu'à la fin du XIXe siècle par le philologue allemand Altenburg qui précise d'ailleurs que l'aire du wallon ne peut ni se restreindre au liégeois ni s'étendre au picard :
« Le dialecte liégeois est senti comme nettement plus différent du picard que les dialectes des provinces de Namur et de Hainaut. Même si le dialecte actuel de la région française limitrophe [...] constitue en quelque sorte un chaînon intermédiaire ou une transition entre le wallon et picard et même si les variétés occidentales du wallon se rapprochent du rouchi, cependant le phonétisme, principalement le consonantisme, accuse de profondes différences entre le picard et le wallon. »
De par cette identification tardive, les autres langues endogènes de la Belgique romane sont quelquefois désignées comme « wallonnes », y compris par leurs propres locuteurs, ce qui peut entraîner une certaine confusion.
Certains linguistes plus contemporains classent cependant l'ensemble du wallon au sein d'un groupe appelé langues d'oïls septentrionales avec le picard, le normand septentrional et l'anglo-normand (langue éteinte), alors que le champenois, le lorrain et le bourguignon sont définis comme groupe des langues d'oïls orientales.